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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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19 novembre 2021

PANTA RHEI : de l'écoulement universel

 

Je ne lis plus guère de philosophie. Tantôt quelques passages d'auteurs anciens - je ne me lasse jamais des Grecs et c'est vers eux que spontanément je me dirige - ou des sentences, aphorismes ou maximes qui font voir l'essentiel en quelques mots, goûtant plus que tout la saillie qui déchire ou pulvérise.

La philosophie qui prétend dénoncer les chimères cultive, hélas, ses propres chimères. Parodiant Alain, je dirai : la philosophie est ce doute sur la philosophie qui sauve la philosophie. C'est dire qu'il n'y a pas d'achèvement possible, pas de Grand Soir qui réconcilierait l'absolu et le relatif, le temps et l'éternité, la cause du désir et son objet. Hölderlin disait justement : "cela ne rime pas", cela ne se ferme pas sur soi à la manière du cercle où le début et la fin coincident.

Il n'y a pas de fin des temps, d'apothéose ou de catastrophe finales en vertu de quoi s'orienteraient le désir, la volonté, l'espérance ou la crainte. Le temps va, il ne peut qu'aller, et ne va nulle part, sans cause et sans finalité, procréant, renversant, dispersant, comme fait le vent.

J'aime cette formule : tout lasse, tout casse, tout passe - que l'on pourrait aussi bien énoncer dans un ordre différent : tout passe, tout lasse, tout casse, ou encore : tout casse, tout passe, tout lasse. Hé, comment voudriez-vous qu'un tel ouragan s'arrête, et s'arrête à tel moment qui fait l'objet de vos voeux ? "Tout" c'est toutes choses (panta) - panta rhei : toutes choses s'écoulent. Nulle stabilité, nulle permanence, nulle identité si la chose présente fut autre auparavant et sera autre dans l'instant qui vient.

"Innocence du devenir" disait Nietzsche. Oui mais le terme de "devenir" est fâcheux parce qu'il réintroduit la finalité que l'on pensait avoir évacué : devenir quelqu'un ou quelque chose. Ce qui nous ramène dans les ornières de la métaphysique. Je dirai plutôt : innocence du temps, innocence du mouvement. Mais pourquoi l'innocence ? Parce qu'il n'y a pas de faute, pas de culpabilité et pas d'expiation. Disons plutôt, pour éviter toute contamination morale : gratuité, grâce, gratitude. C'est la grande leçon d'Epicure.

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