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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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12 avril 2016

DEMOCRITE et PYRRHON : du vrai et de l'apparaître

 

Il y a deux visages de la répétition : la rengaine et le cycle. Laissons la rengaine, j'espère simplement savoir l'éviter. Le cycle peut être répétitif, confinant à la rengaine, ou progressif, évoluant selon l'image d'une spirale ouverte, où certes on repasse par des points discrets, mais en avançant en turbine, à chaque fois un peu plus loin. Forage en profondeur, vis infinie,  où l'on tourne en avançant autour d'un quelque chose qui semble se déplacer d'autant, mais dont, à défaut de le saisir et de le définir, on mesure un peu mieux où il est, ce qu'il re-présente dans son absence même, qui n'est pas un rien. Démocrite avait inventé de toutes pièces un terme nouveau, le "den", en contrepoint du "mèden" ou du "ouden" - qui signifient le non-étant, la négation. Le den c'est quelque chose qui est, mais totalement indéfini, sans caractère particulier, indéfinissable, mais réel - qui existe effectivement, réellement - et là, pour souligner ce que son idée avait de neuf et d'original, il utilise un mot rare : eteon, etea, vrai, véritable, véridique. C'est le statut du discours de vérité : non pas abuser sur un savoir illusoire et controuvé, mais dire ce qui est vraiment, alors que ce qui est échappe à nos prises. Discours à la fois profondément sceptique - on ne peut savoir ce qu'en réalité sont les choses, nous n'avons aucun organe capable de cette exploit - et profondément affirmatif - on sait que cela existe, alors même que le mode d'existence nous reste à jamais étranger, insaisissable. C'est ce qui fait que Démocrite est l'inclassable de la philosophie, déjouant les catégories ordinaires de la pensée.

Le scepticisme n'est pas un nihilisme, il écarte le rien (le mèden) et pose le "il y a " le den de Démocrite. On estime généralement que Pyrrhon a été formé à l'école de Démocrite, par le biais peut-être d'Anaxarque dit le Bienheureux, qu'il avait suivi en Asie. Pyrrhon ne dit jamais qu'il n'y a rien, il interroge les moyens de connaisance et conclut que s'il y a bien quelque chose, ce quelque chose est ce qui nous apparaît, et qu'il n'y a rien au delà. Il refuse de penser que l'apparence soit la manifestation fallacieuse ou tronquée d'un être situé au delà ou deça de l'apparence. Ce à quoi nous avons affaire c'est le mouvement, le déplacement, l'impermanence de purs "phénomènes" - des "apparaître", apparitions et disparitions, processus mouvants et infiniment versatils, déplacés et fuyants. Ce n'est pas de l'être, car l'être est stable, identique à soi, immuable (Parménide). Ce n'est pas davantage du non-être, qui ne serait en aucune manière (ouden ou mèden). C'est un mode d'existence pour lequel aucune de nos catégories dualistes ne saurait convenir - d'où la quadruple négation pyrrhonienne : ni être ; ni non-être ; ni à la fois être et non-être ; ni pas à la fois être et non-être. En d'autres mots, tout ce que nous en disons est hors de propos. C'est poser que le savoir est disqualifié au profit de la vérité, laquelle ne se peut correctement dire, à jamais hors langage.

Le philosophe démocritéen, ou pyrrhonien est cet étrange penseur qui fait interminablmenet le procès du langage, mais qui, dans le langage même qu'il dénonce, fait signe vers ce qui "existe" incontestablement, eteon, comme immaîtrisable certitude du réel.

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Commentaires
T
La vérité, c'est que je sors du ventre de ma mère, dans le liquide amiotique et le sang. L'autre vérité, c'est qu'une fois sous terre, mon corps sera rongé par les vers et les mouches. Enfin, la Loi qui se dégage, c'est qu'une fois mon corps cessant, mon esprit l'est également. Qu'une fois que mon esprit cessant, mon corps l'est aussi. Le corps et l'esprit sont une seule et même chose, appelé corps-esprit. Libre à moi ensuite de me conformer à la Loi ou de suivre mes caprices et me raconter des histoires.
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A
Globalement il y a 2 voies , la voie du corps et la voie de l'esprit. Dans la voie du corps les adeptes veulent se liberer de l'esprit et surtout des pensees dites contaminantes et dans la voie d'esprit le chercheur souhaite se libérer du corps. Les 2 ont leurs avantages et leurs inconvénients. Il existe enfin une 3 ème voie : la voie du fou qui n'est pas une voie, c'est être hors système, capricieux quand on est capricieux, serieux quand on est sérieux, c'est la voie qui mène a soi meme.
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G
En effet. Notons que Diogène Laerce lui-même classe Démocrite parmi les sceptiques. Mais il est vrai que Démocrite rêvait d'une science certaine et déterministe (ce que lui reproche Epicure) tout en notant que l'homme est incapable d'y parvenir, de par la nature même du réel, et en raison de la faiblesse de nos capacités humaines.
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D
C'est un bel hommage à Démocrite qui n'est pas, comme on le croit ordinairement, un penseur déterministe, mais bien un philosophe sceptique.
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A
le monde conscient prend naissance dans la dimension inconsciente , si vous ne cherchez pas dans l'inconscient alors vous ne pourrez jamais comprendre le conscient
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