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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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28 septembre 2011

De l'ACHEVEMENT de la PHILOSOPHIE

Existe-t-il un achèvement en philosophie? Est-il possible qu'un jour le philosophe puisse déclarer : je me suis cherché moi-même, et je me suis trouvé? Une telle assertion paraîtra prétentieuse, mais elle se vérifie dans le sens interne, dans la certitude subjective où le sujet est seul juge, se répondant à lui-même, se confirmant lui-même dans l'affirmation. Nul ne peut, de l'extérieur, objecter quoi que ce soit car toute objection se fera  du point de l'objecteur. Cet achèvement ne se fonde point sur une excellence, sur une connaissance universelle, ou sur quelque qualité particulière. Elle signifie plus simplement, plus prosaïquement que le sujet a conquis une certaine qualité de présence à soi, une congruence relative de sa parole à son être, une certaine authenticité.

Il est de bon ton de signaler que le philosopher serait sans terme assignable, que toute question en appelle une autre, que la réponse serait la mort de la question, si bien qu'aucune réponse ne serait jamais possible. Que c'est l'infinité qui commande la recherche. Je ne pense pas de la sorte. Je me range à l'opinion commune qui prise le résultat. La philosophie c'est la scholè du bien-vivre.

Le problème posé est en fait celui du désir : le désir est-il infini ou fini? La tradition dominante le veut infini. On souligne le fait que tout désir échoue à saisir son objet, qu'il est l'expression d'une relance, d'une métonymie interminable, qu'il passe d'objet en objet sans s'arrêter jamais. C'est dire que l'objet est à jamais inaccessible, voire inconnaissable, toujours manqué. De la sorte la vie se passe à essayer, à s'essayer dans des entreprises à la fois dérisoires et vaines, en dépit de leur coefficient relatif de plaisir. "Nous espérons d'être heureux", reportant indéfiniment le moment du bonheur. C'est là le fruit d'une erreur de jugement.

Vient un moment où il nous semblera vain d'en savoir davantage, d'être plus riche, plus respecté, plus puissant. Où la mesure nous apparaît plus désirable que la démesure. Où, mesurant la vanité relative du savoir, nous sommes capables d'entendre la voix de la vérité. Alors s'achève la quête.

Il y a quelque chose de cette nécessaire dépossession dans l'enseignement de Pyrrhon d'Elis. "Les choses sont également in-différentes, in-décidables, im-mesurables". Cette position de non-savoir est une école de sérénité. Que les sciences poursuivent leur travail de recherche, à l'infini, cela est sans conséquence notable pour le sujet philosophant, car ce que la science établit ce n'est jamais qu'un modèle supplémentaire dont la pertinence reste à jamais indécidable. Nos savoirs sont sans effet réel sur la qualité ou l'inanité de nos existences. La vraie question et la vraie réponse sont toujours ailleurs. La vérité définitive est le non-savoir reconnu et proclamé.

Cette admirable leçon de modestie est transposable dans bien d'autres domaines, comme la puissance, qui est toujours relation à puissance, limitation et dépendance, ou le plaisir, qui est toujours relation d'objet, ou la réputation, qui est relation d'opinion. En tout domaine c'est la relativité des rapports qui détermine la qualité.

Il devrait en résulter un tout autre positionnement dans la vie. Ce qui motivait la quête de l'absolu perd tout attrait. Le désir lui-même se retourne contre soi, dans une sorte de dépressivité, à la fois salutaire et périlleuse, car il ne faudrait pas qu'elle s'éternise. Disons que c'est le moment réflexif, au sens fort, retour sur soi, abandon d'objet, détournement, écart, clinamen subjectif. Une réévaluation s'impose, non comme démision et nihilisme, mais comme juste appréciation du relatif, et courage. 

La nouveauté positive s'exprimera ainsi : le désir se saisit du possible. Le sujet s'exprime dans l'affirmation de projet (pro-jection) susceptible de s'inscrire dans le champ du réel. Des oeuvres, des relations effectives, des actions, poièsis et praxis. C'était l'enseignement de Pindare :

     " N'aspire plus mon âme à la vie éternelle

     Mais épuise le champ du possible".

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Commentaires
H
"La vérité définitive est le non-savoir reconnu et proclamé" à condition de continuer à s'interroger sur ce qu'est le savoir. Et c'est toute la saveur de vivre qui est en cause dans ce savoir. Que deviendrais-je sans cette curiosité, ces questions, ces tentatives de conciliation entre moi et les autres, entre moi et le monde?<br /> Je suis déjà si peu de choses, (je sais si peu de choses) que ce serait bien prétentieux que de désirer tout comprendre, mais j'ai encore cette volonté (plutôt que désir) de rester éveillée pour que s'expriment les possibles.
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C
Bonsoir, <br /> <br /> Avant-dernier paragr. : "l'absolu pert tout attrait." perd<br /> <br /> Quant au fond, voilà ce que je dirais (ceci se veut un échange (malgré le caractère peut-être péremptoire)) :<br /> <br /> Les mots ne servent qu'après coup. Ils sont une fin pas un moyen. Ils sont une conséquence, pas une cause. Les mots ne transmettent aucune vérité. La vérité est en Soi.<br /> <br /> On apprend pas avec les yeux, avec les mots, d'un autre.<br /> <br /> Voilà. De cette vérité (qu'il ne faut pas croire) (il faut démêler le vrai du faux par soi-même), découle tout le reste. Dont un "la philosophie ne sert à rien". :-)<br /> <br /> Bien à vous.
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