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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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15 septembre 2023

Les TROIS ETAPES

 

 

La première étape est toute consacrée à l’apprentissage puis à l’affirmation de soi comme personnage social. Il s’agit de se faire une place dans le monde, parmi les autres, en exerçant une compétence reconnue.  Ce positionnement est indispensable, mais il arrive qu’après quelque temps la personne souffre d’une insatisfaction croissante : le sujet vivant et sentant, sous le poids des rôles, des statuts et des obligations diverses, ressent la fonction comme une aliénation : où suis-je, moi, dans ce jeu universel auquel je participe sans vraiment y adhérer ?

Goethe, après plusieurs années au service du prince, laisse tout et s'en va en Italie : c'est la terre des arts, c'est là qu'il pourra se retrouver au plus près de son véritable génie.

La deuxième étape se présente comme une entreprise de distanciation, de séparation et de resserrement. Une rupture violente et totale n’est pas nécessaire, elle serait plutôt contreproductive. Point n’est besoin de fuir au fin fond des Cévennes. C’est l’esprit qui fera ce travail de dégagement symbolique au terme duquel, dans des conditions favorables, le sujet, libéré des esclavages imaginaires et des discours aliénants, pourra se saisir soi-même comme source de sa propre vérité – ce qui ne va sans douleur, doute et incertitude. Il y a là un remarquable paradoxe : sans assurance de rien, le sujet se vit pourtant comme pleinement existant, rapportant toutes ses expériences à ce centre mouvant qui est soi.

Sous le figuier centenaire Siddharta Gotama touche de sa main la terre et prononce la parole de délivrance : la maison détruite, la maison des passions et des attachements, jamais ne sera reconstruite.

Peut-être, à qui vit assez longtemps, apparaît sur le tard une autre possibilité de vie, où cette subjectivité chèrement acquise, à son tour perd de sa signification et de sa valeur : au regard du vieil homme qui a tant vu, tant pensé, tant connu, les choses du monde, et les représentations elles-mêmes, finissent par perdre leur tranchant différentiel, leur acuité et leur violence. Alors les choses s’égalisent, et le moi, et le sujet lui-même, apparaissent comme des constructions illusoires, des montages, des apparences. Que les gens se battent pour leurs passions, c’est sans doute inévitable, mais ce ne sont que des jeux, souvent cruels, mesquins, diaboliques et insensés, parfois plaisants comme des airs de musique ou des tableaux de genre, et alors ? Le vieux sage, comme les dieux d’Homère, considère le carnaval changeant et diapré des luttes et des réconciliations comme un poème absurde qui n’a ni début ni fin !

Dans le jeu infini, universel des apparences, Pyrrhon d'Elis, revenu de l'interminable campagne d'Asie, se découvre lui-même, non comme un être, plutôt comme feuille au vent, apparence d'une apparence !

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