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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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20 juin 2020

L'ESPRIT NEUF DU DEBUTANT : méditation

 

 

Chaque matin nous sommes à l’orée du monde, chaque matin tout commence.

Chaque matin nous expérimentons la chance d’être débutant, à jamais débutant. Il est essentiel de garder, de cultiver l’esprit neuf du débutant, de celui qui ne sait pas encore, qui accepte de ne pas savoir, et qui se met en route, de bon cœur, avec ardeur :

« Das Wandern ist des Lebens Lust » : cheminer est le plaisir de la vie.

Le débutant, s’il est sincère, est ouvert : son esprit s’accorde à la richesse de l’expérience. Il est prêt pour le voyage.

L’expert sait beaucoup de choses, mais il perd en route la fraîcheur de l’esprit, et souvent il se rapetisse dans les chemins connus. Pour sortir de l’impasse il doit tout oublier pour revenir à l’expérience originelle. Mais le peut-il ?

Les philosophes se rangent en deux catégories : ceux qui s’assurent d’un savoir, le tiennent en certitude et l’exposent en doctrine.

Et puis ceux qui considèrent avec humilité l’énigme originaire à laquelle ils sont tenus, Sphinx multiforme qui échappe à toute saisie, et qui renaît indéfiniment dans des formes toujours nouvelles. On peut bien, à l’aventure, croire comprendre ceci ou cela, mais c’est pour découvrir bientôt que ce n’est pas tout à fait cela, qu’il manque encore quelque chose : « je dis toujours la vérité, mais pas toute, parce que les mots me manquent ». Hélas pas seulement les mots, mais aussi l’intelligence.

Soyons fiers d’être à jamais des débutants, au plus près de la source, à entendre l’esprit de la source, en nous et hors de nous, à nous livrer à la puissance de l’étonnant, à l’irréductible du singulier : ce qu’aujourd’hui nous aurons compris, demain sera peut-être caduc, peut-être pas. Quoi qu’il en soit, chaque matin nous sommes à l’orée du monde.

Philosophie toujours commençante, jamais résolutive. Qualifiant l’attitude pyrrhonienne Diogène Laerce la dit : chercheuse, examinative, suspensive, aporétique, terme qui signifie pleine d’embarras, sans ressource, ou sans conclusion. Cette dernière indication peut paraître décourageante, mais elle dégage le statut de la pensée en vérité : ce qu’on appelle vérité est une position de la pensée qui s’avère fructueuse à un certain moment et sous un certain rapport, qui peut rapidement être contestée et ruinée, ou dépassée, sous un autre.

Ce qu’une telle démarche met à jour c’est l’absence de fondement sûr et de certitude définitive. Mais plutôt que de sombrer dans le désespoir elle invite à revenir chaque matin à l’orée du monde, pour un voyage auprès de l’origine.

 

 

 

 

 

 

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Commentaires
J
Bonjour Guy,<br /> <br /> je ne commente pas tous tes articles, mais j'en lis la plupart avec beaucoup d'intérêt.<br /> <br /> Et je suis souvent en accord avec tes dires.<br /> <br /> Faut que je pense à réécouter les lieder de Schubert, tiens.
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