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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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17 mars 2015

ESSAIS de POETOLOGIE (21) - LE LIEU RESTANT : HOLDERLIN

 

 

Je vous propose un poème de Hölderlin qui thématise le "pauvre lieu" restant. Traduction personnelle, au plus près du texte original :

 

                               LE COIN de HARDT

 

                Vers le bas penche la forêt,

                Et pareils aux bourgeons, pendent

                En dedans les feuilles, auxquelles

                En bas monte en fleurs le sol,

                Non sans témoignage

                Car ici Ulrich

                Est allé ; souvent médite, sur son passage

                Un grand destin

                Prêt, au lieu restant.

  

Le texte est énigmatique, excessivement ramassé en soi-même. Pourtant on voit se dessiner un chemin vers le lieu qui reste, l'obscur, l'écarté, le persistant, au détour d'un paysage forestier où se mêlent les feuilles concentées en bourgeons, pendant vers le sol, où Ulrich - mais qui est Ulrich  ? - est passé, dans un temps inassignable, hors du temps, marquant le lieu d'une trace insensible mais réelle : cela a eu lieu, et cela demeure, mémoire ineffaçable d'un "jadis" à jamais perdu, mais toujours présent dans la pensée du poète.

Cet énigme d'un passé-présent, passé comme réalité perdue et présent comme efficience symbolique, mériterait un approfondissement, lequel nous entraînerait sans doute dans les arcanes souterrains de la langue et du devenir langagier de chaque sujet humain.

Qu'est-ce qui reste quand tout nous quitte, le pays, la tradition, la certitude et l'espoir, et l'illusion même, cette soeur du coeur ? Il ne reste que la langue, elle qui ne passe, ni ne trépasse, tant qu'il y aura des poètes pour enchanter le monde, et une communauté capable d'en recevoir la résonance. C'est peu, c'est un restant, un lieu restant, énigmatique, mais riche de possibilités infinies. C'est ici que nous habitons, c'est ici que nous sommes, dans la mesure, bien pauvre en vérité, où il nous est loisible d'être plus qu'un simple passage.

C'est ainsi que moi-même, revenu de bien des égarements et de bien des vertiges, je me plais à demeurer, habité de mille voix éblouies et éblouissantes, frémissant de la musique venue de loin, qui se mêle aux voix présentes, opéra mirifique, au plus près du réel, dans cet entre-deux où palpite le coeur, accordé à la voix des âges.

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Commentaires
J
Avec Holderlin, voici la poésie qui ne peut me fait songer qu'à mon écrivain favori, Alain-Fournier. C'est un imaginaire qui nous conduit tout droit à la réalité de ce que nous pouvons penser, faire ou dire... <br /> <br /> <br /> <br /> Je cherche quelque chose de plus mystérieux encore. C’est le passage dont il est question dans les livres, l’ancien chemin obstrué, celui dont le prince harassé de fatigue n’a pu trouver l’entrée. Cela se découvre à l’heure la plus perdue de la matinée. – (Alain-Fournier).
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