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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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4 novembre 2022

LE MONDE-AUTRE II

 

Considérant froidement ce monde tel qu'il est, Boudhha en dégagera les caractères suivants (que j'ai abondamment présentés et commentés dans ce blog) : souffrance, impermanence, absence de soi. Ce que nous appelons des êtres sont des processus en mouvement, dépendants d'autres processus, emportés par la course du temps. Des passages, des apparences, sans qu'on puisse trouver, en aucun lieu, des substances fermes et immuables. Cela vaut pour les univers, les étoiles, la terre, les végétaux, les animaux et les humains, sans exception. Universelle vacuité - qu'il ne faut pas confondre avec le non-être - car toutes ces réalités existent bien, mais non selon la modalité "substantialiste" que nous leur attribuons.

Cette dimension de vacuité universelle nous ne la voyons pas, nous la refusons par attachement pathologique à la permanence supposée de notre sacro-saint moi. "Je suis, j'existe" - voilà le credo, dans cette vie, et pour la vie immortelle, s'il est clair que nul ne veut mourir et qu'il exige des dieux une durée infinie, après la mort. Cette permanence illusoire de notre moi nous l'externalisons, la projetons sur d'autres personnes, sur le monde alentour, édifiant une sorte de bulle plus ou moins opaque destinée à nous protéger des aléas de l'existence. Sauver le moi est devenu l'obsession centrale, à partir de quoi s'élancent les flèches acérées de la haine, de l'envie, de la jalousie, de l'ambition, du savoir et du pouvoir. Sous de multiples apparences, chaque moi se comporte comme une machine de guerre, luttant pour un bout de territoire, un hochet, une parcelle de renommée - attaquer pour se défendre, se défendre pour attaquer.

Le terme de "samsâra", qui à l'origine désigne la ronde interminable des existences d'une incarnation à l'autre, peut se réinterpréter comme le signe de la répétition maléfique du malheur : la cupidité, la répulsion et l'ignorance conditionnent la naissance, le retour et le développement des passions - tant que la claire connaissance n'aura pas expurgé le poison. "Nibbana" (nirvâna) signifie extinction : extinction de la soif d'être ou de ne plus être, libération par rapport aux attachements passionnels. 

Le sujet quitte le monde de la souffrance (le samsâra) pour le monde-autre, qui n'est pas le non-être, ni quelque paradis artificiel. Il est toujours là, tout comme le monde est toujours là, mais autrement. Je ne sais plus qui avait dit : être dans le monde sans être du monde. Dedans par nécessité, en dehors par liberté.

Que dès lors il soit au delà de la souffrance je ne le pense pas. Du moins un certain type de souffrance, celle qui tenait aux attachements névrotiques, peut se résorber par la compréhension des causes et des effets. L'impermanence de toutes choses lui apparaîtra totalement évidente, surtout la sienne propre. C'est une construction idéalisée, celle du moi glorieux, qui, en s'affaissant, laisse jaillir une énergie neuve et native, source de créativité et de beauté. L'objet du savoir n'est plus la maîtrise des choses et des êtres, puisque sous l'effet du temps aucune maîtrise n'est possible ; dans son principe le savoir sera thérapeutique : comprendre la souffrance, découvrir ses causes, expliquer les remèdes.

Ces quelques principes, dûment compris et intégrés, fournissent les bases d'une manière de subversion éthique, dont l'esprit n'est pas de ressentiment, mais de joie. A très bientôt, cher lecteur, pour de plus amples développements.

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Commentaires
G
Bonjour et merci Guy Karl pour cet intéressant et clair développement !
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