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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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12 juin 2012

SPIRITUALISER les PASSIONS

 

 

 

 

Spiritualiser les passions…Ce n’est ni refouler, ni cliver, ni dénier.  C’est travailler avec elles, jouer avec elles, entretenir avec elles un accord à la fois amical et polémique. Car on ne saurait les combattre de front, l’intelligence serait perdante à tous coups. Mais elle n’est pas sans pouvoir, à condition de les accueillir d’abord dans leur foisonnement, leur exubérance, les laisser se déployer dans leur sauvagerie, pour mieux en observer la puissance, la prodigalité, et le désordre, et l‘anarchie qui menace. Dans une âme riche elles révèlent bientôt leur diversité, leur contrariété. On se souviendra  d’Héraclite, d’Empédocle, de leur vision tragique : point de passion qui ne combatte une autre, et une autre encore, l’amour et la haine, l’harmonie et la discorde, la tendance à l’unité, et la tendance inverse, et toujours et encore le cycle ininterrompu du devenir, l’innocence du devenir. Il y a quelque chose de dionysiaque dans les passions, qu’il serait ruineux de nier, avec quoi la vie se dynamise et s’exalte, et se perd. Vie et mort tout ensemble, dans un flamboiement magnifique et terrible.

Il y a de petites passions qui ne sont que médiocres, ce sont nos vices, ces petites addictions misérables dont tout un chacun abreuve le mal de vivre, qui lui permet de survivre quand manque la vraie passion, celle de grandir et de se déployer. Et puis il y a les grandes passions, la politique, l’art, la connaissance, auxquelles les meilleurs vouent l’essentiel de leur temps et de leur énergie. Passions actives, pourrait-on dire, si ces deux termes ne s’excluaient. Mais ici l’étymologie est mauvaise conseillère. Passions créatrices de nouveauté, de style, de formes, de beauté, de vision du monde.

La passion de connaissance est elle-même ambiguë, réactive d’un côte, active de l’autre, selon la force dominante qui l’anime. Socrate serait, d’après Nietzsche, un réactif qui place la conscience abusivement au centre de l’existence, rêvant d’une domination entière du Logos sur le Thymos. Symbole de la vie déclinante, génie du nihilisme réactif. Et puis il y a, il y eut les merveilleux poètes et penseurs antésocratiques, créateurs d’un style inimitable, d’une vie riche de couleurs merveilleuses, d’art et de beauté sans pareilles. Chez eux l’instinct de connaissance est toujours dominé par l’instinct plastique, le daïmon créateur d’art et de beauté. Et plus tard il y aura les Tragiques, Léonard, Goethe. Chez ceux-là l’inconscient est actif, la conscience serve, soumise au daïmon, agissant secondairement comme régulatrice, ordonnatrice des forces libérées. La passion souveraine de création,  modérée, ordonnée par la conscience. C’est le modèle indépassable de l’art, qui se nourrit et se tempère de son contraire, la connaissance.

La spiritualisation n’a rien de « spirituel » - si par spirituel on entend spiritualité – c’est le développement de l’énergie, son affirmation dans le sens de la créativité maîtrisée, métaphorique, comme firent les Tragiques de la Grèce, et les grands poètes, artistes et penseurs de la vie, saisie dans son tragique essentiel, et transposée en œuvre de vision et de beauté.

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