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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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21 avril 2023

SUR L'USAGE DU VERBE ETRE

 

Si je dis : Socrate est mortel, le verbe "être" n'ajoute rien à la proposition. Je pourrais fort bien dire : Socrate mortel. C'est bien ainsi que faisaient les Chinois de l'Antiquité : han chan, la montagne (est) froide, ou, chan han : froide (est) la montagne. Introduire le "est" c'est induire l'idée d'une continuité, d'une stabilité, d'une permanence. On en arrive presque mécaniquement à poser une double substance : la substance Socrate, et celle de l'attribution : mortel. Il est vrai que cet exemple n'est pas très gênant parce que l'expérience vient ratifier le contenu de la proposition : si Socrate est bel et bien mort, il faut en effet admettre qu'il était mortel.

Si je dis : les dieux sont immortels, le caractère tendancieux du verbe être apparaît immédiatement. Il faudrait déjà pouvoir établir qu'il existe des dieux, que ces dieux sont, enfin que l'immortalité leur appartient en partage. Or cette immortalité est purement nominale : je me donne une définition du dieu comme être immortel, après quoi je le déclare immortel ! La belle affaire ! Jeannette est muette parce qu'elle souffre de mutisme ! C'est ainsi que nos doctes théologiens ont accumulé les qualificatifs de la divinité : éternité, omniscience, omnipotence, providence etc - tirant de leur chapeau de sublimes lièvres spéculatifs, chimères et bulles de savon !

Mais l'usage le plus comique du verbe être c'est l'affirmation : "je suis". Si par là on veut dire qu'il existe un certain composé physique et psychique, repérable dans l'espace, vivant un certain temps avant de périr, et possédant la capacité réflexive de se nommer, rien de plus légitime. La supercherie commence avec la conviction fantasmatique de l'identité, de la permance d'un moi, ou d'un soi qui serait le même tout au long de la vie. Un pas de plus et l'on se persuadera que ce soi est une âme, puis une âme immortelle. Et le tour est joué. Nous voilà dans la scène célèbre de la pesée des âmes, chez Osiris, ou, plus près de nous, du chatiment infernal chez Jérôme Bosch !

Pour qualifier la personne le bouddhiste dira : un flux. Une suite de sensations, de perceptions, de constructions mentales, de cognitions qui viennent et passent à une vitesse incalculable, se remplaçant sans trêve, si rapides que l'individu peut se persuader qu'elles forment une sorte de continuité, alors qu'elles surgisent et disparaissent, sans qu'on puisse les diriger et les retenir. Où donc le moi ? Où donc le soi ? Où donc l'âme ? Contemplant la  flamme d'une bougie nous disons : c'est une flamme. Mais en fait se succèdent de minuscules éclairs, des crépitements, des variations infinitésimales, dont nous n'avons qu'une vision grossière et déformée, qui nous donne l'illusion d'unité et de continuité.

Dirons-nous que la flamme est rouge, ou orange, ou bleue, haute ou longue, stable ou dansante ? A la rigueur ou pourra dire tout ce qu'on veut, qui n'est ni vrai ni faux. Les peintres modernes en abusent, détachant la couleur de l'objet, la laissant flotter dans l'espace, comme un aigle fou. "La terre est bleue comme une orange" disait l'autre. Et pourquoi pas si l'être n'est que convention, si le mot n'est que bruit.

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Commentaires
J
Socrate a de ces sonorités ! <br /> <br /> <br /> <br /> Sot , Crate , cratie , mais je m'égare ...<br /> <br /> <br /> <br /> Si le nom Socrate désigne un hominidé , alors il est autosuffisant puisque de cette variété d'organisme éphémère il est d'usage de vérifier la mortalité . <br /> <br /> <br /> <br /> Donc épargnons- nous les redondances, pas de "est" pas de "homme", je suggère ni plus ni moins de dire à haute et intelligible voix : " Socrate". C'est tout , une bulle de savon en bout de sarbacane...<br /> <br /> <br /> <br /> Ce disant, l'on sous-entendra, en le déplorant, qu'il VIT encore ( qu'il remue). Remarquons que j'évite moi-aussi scrupuleusement l'emploi du verbe maudit.<br /> <br /> Seule demeure l'incertitude de la date du trépas du quidam. <br /> <br /> Je ne sais pas si l'histoire de la cigüe n'est pas une fable de plus pour nous convaincre de son existence .<br /> <br /> Finalement Socrate n'est-il pas une simple mais énorme hallucination sonore , lui qui par les dieux n'écrivit jamais une misérable once de philosophie ? <br /> <br /> <br /> <br /> Tout au plus démarquons Platon , et disons-le nettement : " Platon EST un sacré bonhomme" qui parti de rien s'est fait tout seul pour arriver nulle part. Et bien entendu , ce loustic s'est arrangé pour, étendu de tout son long sur le sol de la caverne, entendre dire, à l'infini et jusqu'à la fin des temps , qu'il EST plus grand mort que vivant !<br /> <br /> <br /> <br /> On me dit tout bas que je me fais des idées ... mais je n'en crois rien! Hêtre et Taon suggérèrent (selon les toutes dernières supputations éclairées d'avisés chercheurs) à un philosophe germanique du siècle dernier d'écrire d'un trait à hauteur de son génie un ouvrage définitif sur le problème de l'ek-sistence. L'idée serait en effet partie d'une prosaïque piqure de cet insecte sur l'épiderme incidemment mais malheureusement découvert ( et rosâtre) du mollet droit ( ou gauche ?) du penseur alors qu'il assurait sa sieste quotidienne digestive sous le hêtre ci-dessus indiqué. Une association d'idées finalement à quoi se réduit notre passage sur la Terre ... C'est ainsi que notre cher penseur méditant sur le sort d'Io et lisant par excès les Grecs ( anciens ... !) en arriva à pondre son pavé.<br /> <br /> <br /> <br /> Un plaisir de te lire cher Ami ! Bonne journée
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