LA PIE, tanka
LA PIE
Elle saute, obscure
Habitante des érables
D'une branche à l'autre,
Mais lorsqu'elle se déploie
- Ah l'arc-en-ciel - blanc et noir!
C'est merveille, de mon balcon, face aux érables consumés du feu pâle d'automne, de se déprendre de toute attache, de se laisser voguer au fil de la lumière, entre le ciel grisâtre et la pelure jaunissante, vaguement porté au remuement du coeur, aux décours fluctuants des pensées, avec, par moment, la jacasserie criarde d'un couple de pies, piquant les troncs d'un bec vindicatif, sautant, et voletant, et soudain, de l'éventail déplié de leurs ailes, esquissant une roue de courtisane!
Dans la douce mélancolie de l'année finissante elles écrivent quelques lignes, noires et blanches, d'un poème à la lumière, tâchant, de leurs cris rauques, d'en appeler à la clémence des dieux, pour un hiver sans rigueur excessive, pour un printemps futur. A leur manière, fruste mais belle, elles assurent la persistance du jour dans les âpres replis de la nuit qui s'avance.