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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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21 décembre 2008

DES TYPES D' OUBLI (suite2)

La perspective nietzschéenne que nous venons d'esquisser introduit un concept central : c'est la hiérarchie des forces. Quelle est la force dominante, quelles sont les forces dominées? A partir de là l'auteur introduit une symptomatogie : quand prédominent les forces réactives c'est le contrôle, la raison, la morale qui passent au premier plan. C'est le cas de Socrate qui demande aux artistes s'ils savent ce qu'ils font, s'ils ont maîtrise sur leur oeuvre, alors que la force de l'artiste est précisément de faire un avec son génie créateur inconscient, son daîmon. Un créateur qui réfléchit trop ne peut plus créer : il devient critique d'art, c'est à dire un bavard. Le cas Socrate est exemplaire : le tragique inhérent à la pensée des Sages grecs se laisse soumettre aux forces réactives de la pensée rationnelle et engendre cet optimisme qui nous valu le primat théorique et pratique de la technoscience. C'est là le symptôme de l'Occident.

Mais le symptôme à son tour renvoie à une typologie. On décrira des types humains qui sont en fait des figures symboliques de la puissance, et de son contraire. Dans la catégorie des forces réactives il faut placer avant tous les prêtres qui haïssent la vie, les forces dynamiques, l'instinct, le sexe, l'agressivité et qui rêvent de transformer les hommes en moutons de Panurge, vaste troupeau d'abrutis dont ils seront les pasteurs : autre manière de déployer la puissance, autre absolutisme, mais qui s'obtient par l'affaiblissement général, la contention, la culpabilité, la haine, toue la gamme des passions tristes et du ressentiment. Le type "passif" est encore différent : la puissance se retourne contre elle-même et engendre le dégoût, le "taedium vitae", le désespoir, la soif de mourir et une sorte d'inertie qui est déjà la mort. On retrouvera peut-être ces formes dans certaines tendances du mysticisme, dans le masochisme chrétien, dans l'apologie de l'abstinence et de la soumission  : Pascal(?) ce tragique qui a mal tourné et qui s'est suicidé sur l'autel de la révélation. Restent évidemment les types actifs, plutôt rares, et qu'on trouvait plus abondamment avant le misérabilisme chrétien et "monotonothéiste". Guerriers, conquérants, initiateurs de civilisation, créateurs en art, en mythe, en philosophie tragique. Quelques rares modernes ont échappé à la gangrène : Goethe, Hölderlin avant son assombrissement, Léonard de Vinci, et beaucoup d'artistes libres. Le cas de Schopenhauer mérite un examen spécial : il commence dans le pur tragique et sombre dans l'ascétisme. Aussi Nietzsche se sentira-t-il tenu de le quitter malgré son admiration pour s'affranchir définitivement de la gangréne réactive ou passive.

Symptomatologie, typologie, et enfin, et surtout, généalogie. La généalogie est la recherche des principes, ici des forces à l'oeuvre dans l"histoire de la civilisation. Pourquoi, et sous quelles formes le surgisssement des forces réactives du nihilisme? Peut-être ne faut-il pas trop chercher d'explication à la variation de ce qu'il faut bien appeler "la volonté de puissance", qui se déchire contre elle même, combat interminablement sous les espèces les plus variées. Nous retrouvons la splendeur de la formule héraclitéenne : "le conflit est père de toutes choses". - Dans le cadre limité de cette recherche il n'est pas utile d'aller plus loin dans l'histoire la civilisation : retenons simplement ceci, pour l'instant : mémoire et oubli sont des termes généraux, de faux-concepts,  eux-mêmes divisibles en sous-groupes, qui renvoient à des forces antagonistes, dissimulées derrière les apparences des comportements visibles, alors que dans l'ombre, au delà , ou en deça des individus et des sociétés, se joue une autre histoire, qui est aussi la même : lacération de Dionysos, entendons la lutte éternelle du dieu-nature qui naît et meurt, se déchire et se recompose éternellement dans l'Aïon.

Mais notre question demeure, tout en se précisant : comment assurer le retour et la domination des forces actives sur les passives et réactives? Et sur le plan individuel : comment libérer la créativité qui est au coeur de notre appartenance à la terre?

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