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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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20 octobre 2008

DU BOUDDHISME

L'affaire principale de la raison c'est de lutter contre le retour des monstres. Et par là j'entends le fonds obscur  de la psychè collective qui engendre fureur, haine, rejet, déni, peur, destruction d'autrui - et de la nature. Je sais que certaines religions ont pu parfois exercer une fonction régulatrice et socialisante, mais dans l'ensemble j'estime qu'elles véhiculent plus d'erreurs que de vérités. Plus grave encore : sous certains climats elle débilite le coeur et affaiblit le tempérament par l'angoisse savamment distillée dans les âmes. Parfois elle justifie les actes de barbarie les plus abjects. J'ai beaucoup de sympathie pour la tradition bouddhique parce qu'elle est, par principe, dans son fondement même, une psychothérapie plutôt qu'une religion. Bouddha lui-même fut une sorte de psychanalyste avant l'heure, et sans jamais demander un sou pour son assistance thérapeutique. Pour autant je ne pense pas que le bouddhisme sooit une solution pour le monde actuel, parce qu'il contient des dogmes plus que suspects hérités du passé - la théorie du samsâra, l'idée de salut, l'affirmation du nibbâna entre autres. Par ailleurs on ne saurait trop louer le génie psychologique de Siddharta Gotama qui sut dégonfler les illusions du moi, la grandiloquence de notre pensée, les délires du créationnisme et de la transcendance divine, la division en castes, le sacrifice sanglant des animaux, la violence prétendument légitime des états, l'ignorance et la méconnaissance, le désir aveugle de gloire, de propriété, de jouissance inconditionnelle, et de manière générale, la bêtise!

Si je disais plus haut que malgré tout je ne croyais pas à une solution bouddhique pour notre monde c'est parce que  nos contemporains, dans l'ensemble, se trompent complètement sur l'essence de cet enseignement, dans lequel ils croient voir une légitimation du narcissisme, un culte du bonheur individuel et du bien être (Soyez Zen!) alors que cette tradition enseigne une forme sévère de renoncement aux prestiges du moi et à la jouissance, en quoi elle rejoint singulièrelmment certaines découvertes récentes de la psychanalyse (bien comprise!). De la sorte le bouddhisme se voit instrumentalisé par une politique de la consommation ( on consommera des enseignements et des techniques psychocorporelles de toute sorte sans se demandre un instant ce qu'elles signifient sur le plan mental et philosophique). Le narcissisme contemporain se voit justifié une fois de plus, et par la doctrine qui est la plus opposée à ses mirages, la plus difficile peut-être et la plus rigoureuse. En second lieu je ne sais si tout le monde saisit bien la portée toujours révolutionnaire de ces deux affirmations de base : le moi n'est pas une substance, car il n'existe aucune permanence en aucune réalité matérielle, psychique ou spirituelle. Et : il n' y a pas de dieu, qui servirait immanquablement de légitimation narcissique à l'homme qui y verrait une cause, une raison et une finalité. C'est là que le bouddhisme renverse complètement le dogme judéochrétien fondamental : "l'homme à l'image de dieu", formule qui résume bien la prétention irrépressible des hommes à l'immortalité et à la divinisation!. Si après tout cela vous avez encore une sympathie authentique pour le bouddhisme, c'est que vous êtes en voie de Délivrance! Personnellement j'honore absolument Bouddha et ne tolèrerai aucune injustice ou irrévérence à son égard. Mais je pense que les Occidentaux se fourvoient en adoptant un bouddhisme de façade, de complaisance ou de montre et qu'en réalité il faudrait repartir de la tradition la plus originelle et la plus pure de la philosophie grecque. C'est dans cet esprit que je m'honore de réfléchir et de travailler ici, persuadé que nous avons les fondements nécessaires, dans une philosophie rectifiée, pour penser notre modernité tragique, et peut-être y reméder, s'il n'est pas trop tard.

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Commentaires
P
L'absence c'est la présence ailleurs. Je n'ai pu participer à ces débats passionnants pour cause d'occupations impératives. Mais je reviendrai bientôt. En tout cas félicitations à vous pour la qualité de vos débats. Je dirai simplement que du réel nous ne pouvons rien dire, par définition. Parler c'est transposer, et transposer c'est "métaphérein" (métaphore).Le langage c'est une gigantesque métaphore de l'indicible.
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J
Pour l'illusion, quelle meilleure image qu'un mirage dans le désert.<br /> Etre sous le coup de l'illusion, c'est croire qu'il y a réellement une oasis avec ses palmiers.<br /> <br /> Quand disparaît l'illusion : on voit toujours une oasis, elle n'a pas disparu, mais on ne se méprend plus sur la NATURE de la vision.<br /> On peut même imaginer de vivre dans une communauté bâtie sur la réalité du mirage. Pour avoir des relations, il faut admettre l'existence de cette croyance, en tenir compte. Mais ce n'est qu'un jeu pour soi.
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J
" Il faudrait que vous précisiez le sens que vous donnez à l'illusion et au réel."<br /> <br /> Vous avez tout à fait raison. Le réel : n'est-ce pas ce qui ne dépend de rien d'autre pour exister, et pour exister identique à lui-même tant qu'il existe.<br /> L'illusion, n'est-ce pas simplement et uniquement la croyance en un réel qui n'en est pas un. Une erreur sur la nature d'une "chose".<br /> <br /> " une représentation illusoire (même celle du cercle)reste un processus mental, une production de la psyché (et du désir), elle n'est donc pas rien puisqu'elle s'enracine dans une motivation et suppose un mode d'investissement qui possède une vitalité interne. Il y a bien quelque chose "<br /> <br /> Oui, mais quoi ? On ne peut pas conclure parce que le connaisseur fait partie de cette chose et qu'ils sont dans l'impermanence.<br /> <br /> Ce qui caractérise principalement l'esprit humain, c'est la croyance en la permanence : permanence d'un soi individuel, permanence des choses ou des personnes qu'il croit connaître, permanence de son objet de croyance.<br /> A partir de là, l'illusion "il" construit.<br /> <br /> " Que la convention ne porte sur rien de stable et de permanent, je suis d'accord, mais elle n'est pas rien au sens où elle assure un "régime" d'organisation de la vie sociale ou de la vie psychique(on meurt, on vit, on part en vacances, etc.). "<br /> <br /> Tout à fait d'accord. <br /> <br /> "Conventions" ? Dans ma compréhension, Démocrite, cela me fait penser aux catégories impliquées dans le langage et qui formattent notre connaissance, notre conscience. (La lecture, il y quelque temps, de certains textes sur le nominalisme - notamment sur cosmovisions - m'a permis de mettre beaucoup de choses en place)<br /> <br /> Le réel, après tout, nous ne pouvons pas le trouver avec nos conventions, nos catégories, nos illusions sur la nature permanente des choses, c'est lui qui nous trouve.
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D
Cher Jean-Louis,<br /> Merci pour ces précieuses remarques. Il faudrait que vous précisiez le sens que vous donnez à l'illusion et au réel. Vous semblez considérer qu'une illusion n'a pas de réalité : "Ce qui n'est pas fait ne peut pas être défait." ou encore :"Je pense, en effet, que s'il (cercle)est efficient, il n'est pas réel."<br /> <br /> Or, une représentation illusoire (même celle du cercle)reste un processus mental, une production de la psyché (et du désir), elle n'est donc pas rien puisqu'elle s'enracine dans une motivation et suppose un mode d'investissement qui possède une vitalité interne. Il y a bien quelque chose qui se fait puisque ce quelque chose détermine des comportements et des affects particuliers. Ainsi, une illusion a autant de réalité ou pas moins ni plus que le fait de dire "il n'y a que des illusions, le réel est impermanent ou la terre est ronde..."<br /> De même, "on", pas plus que le moi n'a d'existence en soi ; persiste encore ici le régime de la convention (ce qui vient ensemble). Que la convention ne porte sur rien de stable et de permanent, je suis d'accord, mais elle n'est pas rien au sens où elle assure un "régime" d'organisation de la vie sociale ou de la vie psychique(on meurt, on vit, on part en vacances, etc.). <br /> Je pense que sur un plan métaphysique il y a une continuité entre le réel insaisissable et les conventions (de la nature, comme une pierre ou un astre ; symboliques, comme des mots ou des idées ou les illusions qui sont encore des conventions particulières), l'homme n'étant pas "un empire dans un empire" (Spinoza). <br /> Le réel est aussi une convention au sens où quelque chose se passe, des choses se rencontrent, quelque chose fait qu'il y a. En ce sens, une approche métaphysique fait et défait bien quelque chose à l'image de la ou plutôt des natures créatrices et destructrices tout à la fois. <br /> Amicalement
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J
" Jusqu'où peut-on se défaire de l'illusion ? "<br /> Se défaire de l'illusion est illusoire. Puisque c'est une illusion. "On" est une illusion. Ce qui n'est pas fait ne peut pas être défait.<br /> <br /> Même remarque pour : <br /> " Alors, à défaire le moi, à le dissoudre dans l'impermanence, il ne restera plus que l'impermanence "<br /> <br /> " Finalement, une posture d'analyse est toujours une comédie surtout quand elle prétend dire quelque chose. C'est là la force du langage mais c'est aussi sa faiblesse. A partir du moment où nous croyons dire quelque chose, nous faisons exister un cercle, un moi et nous n'échappons pas aux conventions. "<br /> <br /> Le bouddha n'a jamais rien dit. Et pourtant, nous conservons la trace de ses paroles.<br /> On ne dit rien, on ne peut rien dire du réel, de la vérité. <br /> On parle de la parole, on parle de ce qui est dit. C'est à dire de l'illusion avec d'autres illusions. <br /> Il arrive que lorsqu'on enlève une pièces d'un montage ou lorsque l'on ajoute un élément, tout s'écroule. <br /> Mais la pièce n'est pas plus réelle que les autres pièces, simplement, elle a été mise au bon endroit pour faire éclater la vacuité du bel édifice.
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