Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
Archives
Visiteurs
Depuis la création 1 056 437
12 juillet 2022

ENVIE ET JALOUSIE

 

Envie et jalousie sont des maladies de l'avoir, plus exactement de l'appropriation. L'envieux veut avoir ce qu'a le voisin, sa propriété, sa femme, sa fortune. C'est l'homme de l'avidité. Le jaloux veille - jalousement - sur ses biens, s'efforçant d'écarter toute menace ou tentative de lui prendre ce qu'il a, ou croit avoir. Le jaloux veille sur ses biens à la manière de l'avare.

Il y a là une logique de la langue qu'il importe de souligner : avoir, avidité, avarice.

Mais quel est donc ce bien, au delà de tous les biens, que convoite l'envieux ? Le sait-il lui-même ? J'en doute, me demandant au passage s'il envie le bien (l'objet), ou le rapport que l'autre entretient avec l'objet : "il dit que c'est à lui, mais il ment, c'est à moi que cela revient. Il m'a volé". Il raisonne à partir d'un fondement pathologique, considérant qu'une injuste partition l'a coupé d'une partie de son être (présentifiée par l'objet du litige) et que l'injustice du sort l'a frauduleusement attribué à l'autre. Ce ne serait donc que justice s'il pouvait récupérer la part volée. Tous les enfants traversent cette crise avant de comprendre - ou pas - que ladite perte d'objet est un phénomène universel, et qu'elle conditionne l'accès à une symbolique universelle de l'échange : donne moi ce qui me manque, je te donnerai ce qui te manque.

Envie et jalousie sont apparentés, ce que signale l'usage courant de la langue où un terme est volontiers substitué à l'autre. Pour autant ils ne sont pas identiques. La structure de l'envie est duelle : deux protagonistes, un objet de litige. La jalousie serait plutôt ternaire, comme dans la formule classique : le mari, la femme et l'amant, avec toutes les variantes imaginables, puisqu'on peut permuter les termes sans modifier la structure. Etymologiquement la jalousie est l'expression du "zèle" (zelousos, zelusia) à l'égard de quelqu'un, d'un souci et d'un attachement, avec la crainte plus ou moins vivace que ce quelqu'un se détourne vers un tiers. Le jaloux veut garder pour lui seul ce qu'il aime et souffrira de l'éloignement, réel ou imaginaire, de la personne aimée.

On se demande depuis des siècles si la jalousie est une marque d'amour et s'il existe un amour sans jalousie. "Tu est jaloux, donc tu m'aimes" - sauf que la jalousie peut virer à la paranoïa lorsque tout tiers, quel qu'il soit, est perçu comme un rival menaçant. Cette passion-là est sans remède. Dans l'amour ordinaire il faut bien voir une certaine dose de jalousie qui exprime un attachement somme toute légitime. Peut-être qu'à ce niveau amour et jalousie sont presque synonymes : aimer c'est veiller sur ce qu'on aime, le garder - s'il consent à cette garde - et veiller à son bien-être, comme on le fait pour soi.

Publicité
Publicité
Commentaires
P
Quand amour et jalousie se veulent synonymes, on est encore bien loin de l'agapè au sens christique du terme. A mon sens, seul type d'amour qui puisse être tenu en visée, ne serait-ce que par sa noblesse.
Répondre
Newsletter
153 abonnés
Publicité
Derniers commentaires
Publicité