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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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17 mars 2022

LE BEAU ET LE TERRIBLE

 

            "Car le beau n'est rien

               Que le premier degré du terrible ; à peine le supportons-nous,

               Et, si nous l'admirons ainsi, c'est qu'il néglige avec dédain

               De nous détruire." - Rilke, Première Elégie.

Cette idée paraîtra étrange. En général on considère que le beau est plaisant, agréable, qu'il offre une image éminente et apaisante de l'équilibre entre les forces, qu'il réalise ce miracle, impossible dans la vie réelle, de concilier ce qui s'oppose, de créer une harmonie supérieure, laquelle satisfait le coeur autant que l'esprit. Dans l'image réconciliée du beau nous nous réconcilions nous-mêmes, accédant pour quelques instants privilégiés à une forme d'existence idéale. Telle est la vision du Parthénon où l'absolu régularité des colonnes est obtenue par le calcul méticuleux de l'irrégularité. Aucune des colonnes n'est parallèle à une autre, et toutes apparaissent parfaitement parallèles. Le beau est la magnification de l'apparence, son triomphe et sa justification.

Rilke dit tout autre chose : il faut considérer le beau comme une étape sur le chemin qui va de l'ordinaire au terrible. Ou encore, une halte, comme un bref séjour avant de pénétrer dans le continent de la terreur. Le beau à mi-chemin entre l'ordinaire, l'habituel, le familier, le prosaïque, le trivial, et, à l'autre bout, l'inconnu, le redoutable. Le beau serait le moment gracieux et trompeur de l'équilibre instable, mais qui porte en soi la plus grande menace, sans doute parce qu'il dissimule la menace dans le jeu même des apparences.

Vision dynamique : dans l'immobilité apparente de l'oeuvre, dans son achèvement apparent, il faudrait pressentir le drame, percevoir l'instant où tout bascule. La beauté classique était calme, sereine, immobile dans sa gloire : chez Rilke - et avec lui chez l'artiste moderne - tout est mouvement, montée et descente, si bien que rien ne résiste au temps et que le beau lui aussi est souterrainement emporté vers le gouffre.

Reste à dire quel ce "terrible" qui absorbe toute chose, et le beau lui-même, dans l'abîme. Le poète nous décrit l'esseulement, la déréliction, la sourde angoisse qui l'étreint de ne pouvoir se fonder sur rien, de voir tout emporté par le vent, de glisser incessamment vers le néant. Le beau ne nous donne aucun fondement. Schiller avait écrit : "Même le beau doit périr". Il faudra chercher autrement, en soi-même, de quoi se donner consistance et certitude.

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Commentaires
X
J'ai du mal a comprendre mais chacun voit selon sa propre constitution.
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M
C’est vrai le Beau le Juste le Vrai cela n’est pas suffisant. En fait il y a l’énIngme et le secret. Situation insondable dont nous devons nous accommoder
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