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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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12 mai 2021

De la PATHOLOGIE chez les ARTISTES

 

On ne peut ramener un artiste ou un penseur à sa pathologie. Certes, à lire leur biographie, on éprouve quelque gêne et désagrément. Certes, dans le lot, vous trouverez des schizophrènes, des asociaux, des narcissiques impénitents, des caractériels, voire des sexistes ou racistes. C'est décourageant, mais inévitable. Ces individus-là, comme tous les autres, ont leur tare, leur zone d'ombre, leur folie intime, mais un artiste authentique ne s'explique pas, ne se comprend pas à parir de là. Et son oeuvre moins encore. 

On peut toujours dire que Schopenhauer était un triste sire : mégalomane, caractériel, méprisant, aimant son chien plus que les hommes, détestant la "canaille", préoccupé obsessionnellement par son oeuvre, qui, croyait-il, exprimait une fois pour toutes l'essence de la vérité. Voilà un méchant homme selon nos critères moraux. Mais lui-même écarte souverainement l'objection en disant : "Je suis celui qui a écrit Le monde comme volonté et comme représentation". A ses yeux cette oeuvre justifie tout, et s'il n'a su devenir le Bouddha de Francfort c'est que sa propre nature le poussait dans une autre direction.

On ne choisit pas sa nature. Tout au plus peut-on l'amender, et encore, sur ses contours, jamais sur le fond. Schopenhauer lui-même défendait l'idée d'un caractère inné exprimant une sorte de prédestination individuelle qui conditionne pour l'essentiel le cours de la vie. Que tel individu devienne poète ou musicien ce n'est pas un hasard, ce n'est pas davantage le fruit de l'éducation, c'est avant tout l'expression de sa nature - de son idiosyncrasie native et naturelle. 

A partir de quoi on pourrait soutenir que les pathologies qui nous gênent tant chez certains artistes sont des éléments indispensables de leur création. Voyez Mozart, infantile, capricieux, fêtard, dépensier, insolent, rebelle, prétentieux - tant que l'on voudra - et maintenant imaginez-le vertueux, soumis, économe - lequel des deux est l'auteur des Noces de figaro et de la Flûte enchantée ?  Le comportement fastueux, mondain est comme un pendant nécessaire aux travaux de la musique, les deux avançant du même pas. Enlevez l'un vous enlevez l'autre.

Je ne sais plus quel poète avait demandé une analyse à Freud pour soulager son angoisse. Freud refusa, au motif qu'une analyse détruirait la créativité.

Le pire ennemi de l'art, outre les pouvoirs religieux et politiques, c'est la morale. Et c'est une morale plus subtile, plus insidieuse qui, dans  cette obsession de la santé, nous fait mépriser ou plaindre tant d'artistes originaux.

Certains artistes ont su développer leur oeuvre dans l'harmonie, mais la plupart travaillent dans la souffrance, tout en goûtant l'enivrement de la création. Il y a un prix à payer : le travail bien sûr, la solitude souvent, une forme laïque d'ascétisme, un certain gauchissement du caractère. Que la pathologie accompagne cette démarche n'a rien pour nous surprendre : l'artiste, aussi grand soit-il, n'est jamais qu'un homme.

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Commentaires
P
Dans le film "AMADEUS", Salieri ne comprenait pas que Dieu ait pu doter un être aussi vil que Mozart d'un tel talent ! Je suis d'accord avec vous de ne pas juger l'œuvre à l'aune de la qualité morale de son créateur, je crains que sinon, nos musées (et librairies) ne soient bien dépourvus ... Quant au poète qui refusa la psychanalyse de Freud, malgré l'insistance de sa maîtresse Lou Andréas Salomé, il s'agit du très tourmenté Rainer Maria Rilke.
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Nous ne pouvons devenir ce que nous ne sommes pas et nous devenons toujours ce pourquoi nous sommes destiné. Devenir soi-même est le seul but.
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