RESISTANCE (2)
Certains, avec la hargne, la rogne et la grogne du ressentiment, ont entrepris de déboulonner Freud. Puis ils s'en prennent à Darwin. Bientôt viendra Galilée, et Giordano Bruno, et Kepler. Tout à la fin on va ressusciter Ptolémée, à moins qu'on en vienne à soutenir que la terre est plate comme une galette, qu'aux deux bouts on ne tombe dans le néant, et que les étoiles soient des luminaires allumés pour notre bon plaisir !
Pourquoi ne pas restaurer le culte de Baal, d'Isis et d'Amon-rê ? Vous trouverez toujours quelques illuminés pour soutenir une croyance, quelle qu'elle soit.
Il faut croire que les développements récents de la science viennent bousculer notre bon vieux narcissisme : il est si commode, si valorisant de se penser au centre du monde, d'imaginer que l'univers est fait pour nous, pour notre bien-être, et que notre intelligence illumine la création entière, confère à toute chose sa signification et sa raison.
La science nous enseigne tout autre chose : l'immensité et l'histoire de l'univers (qui n'est peut-être pas le seul dans l'immensité). L'évolution de la vie à partir de la matière inorganique, et l'apparition fort tardive des espèces Homo et de la conscience. Le développement de la culture, ou plutôt des cultures historiques, qui sont aussi des sortes de surgissements organiques. L'apparition plus tardive encore de la politique et du droit, et de l'individu autonome. Et au coeur de l'homme le conflit entre le conscient et l'inconscient, le désir subjectif et le lien social.
Face à la complexité de ce monde changeant, pluriel et menacé il est si commode de se ruer sur un idée simple et de l'ériger en dogme universel.
La réaction politique, partout à l'oeuve, se double d'une réaction plus incisive encore, celle de la pensée et des représentations. Vaste mouvement régressif qui menace cette liberté chèrement conquise qui fait notre fierté et notre bonheur.
De ceux-là qui veulent la dictature et la pensée unique, je ne serai jamais !