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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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1 septembre 2020

ETE INDIEN

 

Les promesses de l'été indien... Chaque année je vois venir avec délectation, après l'incendie estival, cette saison, demie saison devrais-je dire, qui n'est plus l'été et qui n'est pas encore l'automne, particulièrement belle et ensoleillée, doucement rêveuse le matin, rêveuse comme une femme enceinte, solaire à midi, et tendrement crépusculaire, avant de sombrer dans la nuit. Enceinte disais-je, de mille fruits à venir, de mille souvenirs, de mille pensées fécondes, alors que déjà le vert des feuilles s'adoucit et pâlit. Me voilà, en pensée, cheminant sur les versants vosgiens, entre les vignobles et les villages fleuris, faisant halte souvent pour contempler les hauteurs, ces beaux châteaux qui abritèrent chevaliers et brigands, vers lesquels me pousse une étrange nostalgie, comme si moi aussi j'avais vécu en ce temps-là, chevalier d'infortune, ou barde errant, vivant d'une autre vie, plus aventurière, plus héroïque. Hélas, peut-être n'aurais-je été qu'un pauvre bougre écrasé de peine et de travail, ou l'un de ces malheureux traîné de force à la guerre, ou quelqu'obscur sacristain pourrissant dans les antres d'une abbaye. Si j'étais romancier je ferais le récit drolatique de mes existences antérieures, je ferais voyager mon héros dans l'espace et le temps, je pourrais assouvir à peu de frais ce besoin romanesque d'un ailleurs que je n'ai pas su explorer dans ma vie réelle.

Me reviennent la musique et les paroles d'une chanson de naguère :

           "Aujourd'hui c'est l'automne

          Et je pleure souvent".

Hé quoi ! Non, ce n'est pas l'automne, pas encore, et je n'ai nulle raison, nulle envie de pleurer ! Tout au contraire je me réassure de moi-même, je m'octroie une couronne fleurie, couronne de poète, pour célébrer une victoire chèrement acquise : tout cela était plutôt mal parti, tout cela annonçait la catastrophe, et la catastrophe n'a pas eu lieu. A dire vrai, je l'ai effectivement frôlée de près, pour un peu je sombrais avec perte et fracas. Aujourd'hui, revenu de tout, je goûte les douceurs de la sérénité et les fruits de la sobriété. Eté indien : délicat équilibre entre le solaire et le lunaire, la lumière et les ombres, l'affirmation et la négation, le yang et le yin. Ou, en d'autres traditions, le samsâra et le nirvâna. Car enfin, s'il n'existe pas d'autre monde que celui-ci, pas d'autres cieux ni dieux, si tous les idéaux ne sont que chiffons de papier, il faut bien se contenter de cette terre-ci, vivre de cette vie-ci, et si possible y vivre content. Pyrrhon dirait : les choses sont des apparences parce qu'elles apparaissent, elles ne peuvent faire autre chose que d'apparaître, et de cet apparaître faisons notre miel. Sobriété. "Mange ton riz, bois ton eau, c'est la voie de Bouddha". Et que diable pourrait-on faire d'autre qui ne soit "vanité et impatience d'esprit". (Hippolyte Taine : Vie et opinions philosophiques d'un chat, Editions Rivages).

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Commentaires
G
Un été qui n'en finit pas est accablant. Pas d'autre solution que de se rafraîchir à la fontaine des belles oeuvres de la littérature universelle !<br /> <br /> Bon courage !
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A
Je suis ravie que vous ne soyez pas, (dans cette vie-ci) un « obscur sacristain pourrissant dans les antres d’une abbaye » et que vous profiterez de l’été Indien, tandis que vous nous offrez « Vie et opinions philosophiques de Guykarl »<br /> <br /> Saludos, Ana<br /> <br /> P.S.<br /> <br /> Sacré veinard!<br /> <br /> Ici, où j’habite, l’été , il ne semble finir.... jamais.
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X
La pluie tombe<br /> <br /> chaude et parfumée<br /> <br /> le tonnerre gronde<br /> <br /> l'éclair déchire le ciel<br /> <br /> c'est la fin de l'été
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