LE CHEMIN BEAU : méditation
Des rêves, encore...
Voilà du moins quelque chose qui ne s'épuise pas. Et alors même que l'on peut croire la source tarie, en quelque nuit soudaine, elle se remet à jaillir.
Une puissance invisible mais impérative pose la barrière : par ici tu n'iras pas ! Et quel est donc ce chemin que je prétendais emprunter ? Hélas, c'était le chemin trop connu, trop familier, trop facile que mes pas, déjà, avaient foulé, dans un jadis et naguère qu'il faudrait savoir oublier. Chemin d'aisance et de paresse, chemin sans surprise, sans écueils et sans éclairs, chemin des écoliers.
Il faut choisir l'incommode, la sente raide à flancs d'amont, sous le regard fixe des chamois figés dans la rocaille.
"Qui es-tu, toi qui vas, et qui ne sais où tu vas ?"
C'est la question oubliée de la Sphinge, la vraie question posée au tueur de Laïos - car nul ne sait vraiment où il va, alors même qu'il croit savoir. "Plein de ressources, sans ressources pour rien, l'homme va".
La vraie gloire c'est d'aller, et non d'avoir ou de pouvoir. C'est cette nécessité-là qui fait l'homme, cette aspiration indéfinie à l'ouvert. C'est la gloire obscure, lumineuse du chemin, entre ciel et abîme, et quel qu'en soit le but.
Nous allons vers rien, mais nous allons. C'est le chemin qui est beau.