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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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14 mars 2016

Du CAFE-PHILO : une analyse déontologique

 

Voilà plus de dix ans que j'anime des Café-philo, et je n'en suis pas lassé. J'entends, navré, certains "professionnels" déclarer avec superbe que le café-philo ce n'est pas de la philosophie. Sans doute, accoutumés de prêcher du haut d'une estrade, ne veulent-ils pas se commettre avec la plèbe, se risquer dans une arêne où ne compte guère le titre universitaire, où, en somme, il y a le danger d'être mis à nu, soupesé et disqualifié. Ici nulle institution ne vous protège, ne vous impose ses normes, ne définit les rôles et les valeurs. Tout est ouvert, et cela ne manque pas d'inquiéter. Ou de réjouir !

On oublie trop souvent que le cours - ou la leçon comme on dit dans les milieux universitaires - est une production fort tardive dans l'histoire de la philosophie. Ni Héraclite, ni Socrate, ni Diogène ne font des cours. Héraclite se retranche dans la solitude de son livre, Socrate parle au tout-venant dans les rues d'Athènes, Diogène, selon les circonstances, aboie, rugit, raille ou fait des calembours. Le cours apparaît avec Aristote, que l'on appela d'ailleurs "le professeur". Ce modèle s'est si bien imposé qu'il est presque impossible de faire autrement. 

Le Café-philo fut inventé pour ouvrir la philosophie sur le monde extérieur, en conviant le quidam à la réflexion hors des sentiers battus de l'université et du lycée. La formule a connu un beau succès, juque dans des pays lointains. De la sorte une certaine philosophie informelle et populaire circule de par le monde, à l'écart des grands courants médiatiques. Mais il est fort difficile d'en mesurer les effets.

Pour ma part j'ai constaté que le courant ne passe guère entre l'université, le lycée, les centres de formation, les publications d'auteurs et les café-philo. Chacun semble camper sur ses positions traditionnelles, comme s'il disposait d'un monopole de la pensée. Dans notre ville nous invitons régulièrement des auteurs, ou spécialistes d'autres secteurs, pour diversifier et dynamiser la philosophie (sociologie, droit, art, poésie, médecine, psychiatrie etc). A l'horizon se profile l'Idée régulatrice d'une universite philosophique, pour laquelle nous n'avons pas encore, à ce jour, les moyens indispensables.

Il faut bien reconnaître que le Café-philo peut engendrer le meilleur et le pire. Pour éviter le pire - discussions creuses ou passionnelles, manque de rigueur, absence de méthode, rivalités et jeux d'egos - il faut un dispositif à la fois souple et ferme qui règle la prise de parole, bannisse la violence, organise le débat autour d'un thème soigneusement circonscrit - pour cela je crois bon qu'un modérateur se dévoue à la fonction, laissant à l'animateur le rôle d'écoute, de synthèse, de clarification, de proposition, sans a priori, sans volonté d'imposer un point de vue quelconque. Inviter à la liberté d'expression ne suffit pas : il faut poser en pricipe que cette liberté, en elle-même indispensable, doit se règler au service d'une recherche commune, laquelle se fait sous l'aplomb de la vérité. Si la référence à la vérité comme Idée régulatrice est absente, si elle ne s'incarne pas dans une pratique exigeante et ouverte, nous ne sommes pas dans le domaine de la philosophie, et alors le débat peut en effet basculer dans le match télévisé, l'empoignade ou le café du commerce.

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Commentaires
G
Merci, Chère Hyacinthe, pour cet encouragement qui va autant à tous ceux qui travaillent ensemble à ce beau projet.
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H
Je profite de ce texte pour vous assurer de mon soutien pour cette ouverture dans la cité de Pau. Il est en effet tout à fait souhaitable que les disciplines, compétences, singularités se croisent, s'interrogent ensemble au sein de rencontres philosophiques. Votre investissement en la matière mérite donc toute ma reconnaissance. Merci à vous .
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