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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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9 février 2012

"Je me suis cherché moi-même" (2)

Chercher c’est tourner autour (circa : autour de). Autour de quoi ? D’un trou. C’est le trou du réel. Cela clairement posé il n’est plus rien à chercher. Le réel épuise tout, contient tout. Il est le Tout. Mais cela, d’ordinaire, nous ne le savons pas, aussi continuons-nous à chercher, à nous débattre comme des enfants dans les ténèbres. Mais celui qui comprend cela est délivré. Il peut dire comme Pyrrhon : fin de la quête. Au-delà, toute quête est toxique et ne fait qu’entretenir le trouble de l’âme.

Se chercher soi-même exprime nécessairement que l’on se dédouble entre un sujet en manque et une instance autre, inconnue, supposée détenir le savoir  qui manque, et dont je suppose qu’il me révèlera à moi-même. Cette illusion est féconde en tant qu’elle me met en route, qu’elle me permet de scruter et de faire apparaître les in-sus, les oublis, les dénégations sur quoi j’ai bâti mon histoire. C’est une sorte de recollection de moi-même aboutissant à une identité narrative qui me tiendra lieu d’identité. Mais cette opération a ses limites. Car enfin, tout le processus repose sur une illusion, sur une mise démesurée et proprement hallucinatoire : j’ai misé sur l’autre, comme fait le croyant qui s’en remet à Dieu. Mais pourquoi s’en remettre à Dieu, quelle que soit la forme sous laquelle il m’apparaisse, si ce n’est par faiblesse et confusion ? Suis-en l’autre ou suis-je en moi ? Où donc est le sujet ?

« Il est sot de demander aux dieux ce que l’on peut se procurer par soi-même ».(1)

La vérité c’est que l’autre est troué tout comme moi, et que le trou est en chacun. Dès lors l’illusion s’écroule. Le roi est nu, il n’y a plus de roi.

La recherche repose toute entière sur le désir de savoir, sur l’espérance de savoir. Quand le savoir atteint son terme, non que l’on sache vraiment mais que l’on sache les limites du savoir, alors apparaît la vérité. La vérité est cet au-delà du savoir qui nous met face au réel.

« Ici point d’espérance, ni de salut : les choses sont ce qu’elles sont ».(2)

Il y a deux sortes de philosophies : celles qui disent que la quête est infinie, situant la vérité dans un lointain inaccessible, et celles qui déclarent : fin de la quête. La philosophie ne disparaît pas pour autant : elle se métamorphose. Elle se fait jeu et danse, et chant, et volupté.(3)

 

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(1) Epicure : sentences vaticanes 58

(2) Ce n'est pas une citation, sauf à me citer moi-même. Les guillemets pour donner du relief!

(3)  Vérité se dit en grec Alètheia. On écrira A-lètheia : non-voilement, ou Alè-theia :danse divine. En suivant la logique de ce texte le dévoilement fera place à la Danse divine, Danse des atomes dans le vide (Lucrèce), Danse des Elements (Empédocle) ou encore, et mieux, Danse dionysiaque de la liberté!

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Commentaires
S
Se chercher , apprendre à me connaitre est le plus beau voyage que j'ai pu faire dans ma vie; mais au bout de 30 années de recherches je me suis aperçue, qu'à chercher sans cesse , j'avais rater " le présent" de la vie! ce moment précieux que nous offre le présent avec sa beauté ou sa dureté, et qui ne reviendra jamais; mais faut il vivre en s’étourdissant avec tous les plaisirs de la vie, et laisser les questions aux autres, ou se chercher même" si je ne suis pas un initié "comme disait Hermann Hesse, " j'ai été chercheur dit il et le suis encore, mais je ne cherche plus dans les astres et les livres; je commence à entendre ce qui bruit dans mon propre sang........la vie de chaque homme est un chemin vers soi même, l'essai d'un chemin , l'esquisse d'un sentier; personne n'est pourtant parvenu à être entièrement lui même; chacun cependant tend à le devenir, l'un dans l'obscurité, l'autre dans la lumière, chacun comme il peut " C'est tout ce chemin vers soi qui ouvre les portes du coeur et de l'esprit, et peut être que sans lui , je ne me serais pas réveillée un matin, heureuse, d'être qui je suis, ressentant la plénitude en moi, et pourtant imparfaite .Contempler la beauté simple de la nature qui m'entoure , savourer l' instant présent d'une rencontre, la joie d'être avec mon petit fils riant de ce moment à jouer ensemble......."je sais que je ne sais rien" disait Socrate à qui je vle ces paroles mais vivre!<br /> <br /> vivre intensément la vie et pouvoir , quand le moment sera venu de tirer ma révérence, me dire que j'ai vécu la vie dans son entièreté: corps, coeur et esprit.
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M
Ce « désir » de se chercher soi même est aussi la révélation de sa propre opacité, de sa propre énigme. Faut-il pour autant redoubler d’efforts dans cette quête éperdue et perdue par avance. Faut-il au fond désirer « persévérer contre son être » ? Etrange nature humaine qui n’a de cesse de vouloir se tenir à la fois au plus près de son être et simultanément de s’en éloigner. Distanciation, dédoublement puis rapprochement et tentative désespérée d’adéquation avec ce que d’aucuns évoquaient comme étant notre seinheit ( êtreté).<br /> <br /> Pour quelques cinéphiles, « C’est un jour sans fin » qui se déroule et se prépare, ou l’éternel recommencement du même si vous préférez. Je cherche à m’approprier le PROPRE de la nature humaine et de ce qui me fait face : l’autre, la chose ou l’ob-jet <br /> <br /> Mais que cherchons-nous vraiment dans cette quête d’absolu ? Une forme d’unité, d’adéquation de soi avec soi, de réconciliation avec l’altérité, pour au bout du compte trouver l’apaisement, la douceur, l’absence de troubles ou la jubilation de SAVOIR enfin ! <br /> <br /> Pour quelques uns, il s’agira d’interroger le mode même du philosopher. Tout « questionner » est un « chercher », or « tout chercher » est d’une certaine façon déjà un « trouver » n’est-ce pas ? Pour autant il n’y a point de réponse, de solution, de résultat, de certitude à attendre, et c’est heureux ! Je veux croire à l’expression des champs des possibles, à l’imprévisible et à l’inattendu, aux lacets sinueux du torrent qui caressent les rochers, au doux va-et-vient du ressac qui sculpte la grève sans jamais reproduire une empreinte identique. Le même est l’autre, c'est-à-dire que l’autre participe du même et réciproquement.. <br /> <br /> Dans son roman Siddharta Herman Hesse posait cette question essentielle : « que vaut tout ce savoir quand on ignore la chose qui importe le plus au monde ? » c'est-à-dire le non savoir, à mon sens. « L’énigme est bien ce qui nous porte » plus que la connaissance, n’est-ce pas cher GK ? En somme, c’est l’ouvert de l’ouvert qui nous motive, et le risque pour le philosopher serait de vouloir à tout prix le clore à défaut de l’e-clore…
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