FABLE ZEN : Le RAT et le CHAT
Le RAT et le CHAT
Un bouseux graveleux excédé par un rat
Qui dévorait toute sa farine
S'en vint trouver Sa Majesté le Chat
Seigneur incontesté de la gente féline
Grande taille, féroce, poil hérissé
Belles griffes fourchues, insigne massacreur
De rongeurs.
Maître Chat et bouseux retournent au logis
Criant vengeance. Le rat ne quitte plus son abri.
Le chat, jaloux des prestiges de classe
Sur l'heure se met en chasse
Et court, et flaire, et rôde et se démène
De la cave au grenier
Jusqu'aux tréfonds obscurs de l'atelier.
Ce jeu dure quelques semaines.
Le rat semble évanoui, blotti en son repaire.
Le chat quitte la place
Queue basse
Sans gloire et sans salaire.
Aussitôt le rongeur exerce ses ravages.
Le paysan furieux va trouver au village
Un petit vieux réputé sage
Qui lui montre un matou de lugubre facture
Maigre à pleurer, moustache basse
Mine lasse
Et tout dépenaillé dans son humble fourrure.
- "Est-ce là le héros que vous m'avez promis"?
- "Ne jugez point ! Croyez ce que je dis
Ce chat est la terreur des rats et des souris".
L'homme va. Le chat le suit, et sans délai
S'allonge douillettement près du foyer
Pour dormir et baîller,
Rêver tous les jours que dieu fait.
Le rat s'étonne, et bientôt, plus curieux
Quitte à petit pas son repaire
Pour observer ce chasseur paresseux
Et voyant que nulle affaire
Ne pouvait le distraire
Il se met à vaquer, insoucieux
Comme il faisait jadis, et sans méfiance
Il s'approche du chat qui ronflait en cadence.
Mais le félin avait l'oeil bien ouvert
Et d'un bond fantastique attrape l'imprudent
Et le déchire à coups de dents.
Méfiez-vous, chers amis, des gens inapparents
Ce sont les plus mordants.