Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
Archives
Visiteurs
Depuis la création 1 054 816
4 juillet 2008

SINGULARITE et IDIOTIE

Qu'est-ce que la singularité, une fois écartée la référence à l'identité.(Voir mon article plus haut : identité et singularité) Cette question revient à se demander si, hors les consignations sociales, culturelles et sociales, il reste quelque chose en propre à ce qu'on appelle la personne ou l'individu, ou le Self, ou toute autre dénomination courante. Qui suis-je, si j'écarte ce que je suis pour moi et pour les autres, donc toutes les images, représentations, rôles, statuts, et autres conventions, imaginaires ou symboliques? En toute rigueur on répondra  : l'insaisissable singularité qui fait que je ne suis pas un autre que moi, que j'ai ma façon à moi de respirer, de manger, de sentir, de penser, d'agir ou de ne pas agir, de me situer dans le temps du monde et d'élaborer mon histoire. De tout cela on peut toujours parler en langage conventionnel, et d'ailleurs, qui s'en prive, mais allant plus loin, j'aimerais que l'on abandonne toute cette fricassée de notions et de fictions collectives pour tenter de dire vraiment s' il reste quelque chose en propre, de singulier précisément, de non communicable, d'indéfinissable et non moins réel pour autant, ce que dans la tradition occidentale on appelait l'âme, dont le sort nous était plus précieux que la vie même.

Singulier n'est pas particulier si particulier désigne le partiel ou le partial, donc un sous-ensemble d'un groupe qui l'englobe. Le particulier s'oppose au commun. En grec koinon c'est le commun - le singulier c'est l'idios!  Ce terme ne renvoie pas à une imbeccilité ou une déficience morale, mais à ce qui ne se range pas dans les ensembles constitués, donc exceptionnel, privé, spécial, original. L'idiot c'est l'original, avant de devenir le crétin dans l'évolution sémantique de la langue française. C'est à cette acception qu'il faur revenir, en deça de la connotation laudative (exceptionnel) ou péjorative ( 'ytange ou choquant). le singulier n'est pas une varaiante du particulier, c'est une catégorie totalement différente, qui se soutient et s'affirme en soi et par soi, et non par différence intentionnelle. Je suis singulier non pas parce que je cherche à l'être, ce qui serait affectation ou hypocrisie, mais je le suis de nature, me vivant de toujours comme inassimilable à nul autre, original si l'on veut, mais au sens d'originaire. Le singulier n'est pas exceptionnel, ce qui serait encore comparer, situer hors norme, ne serait-ce que comme confirmation de la norme. Non pas : le singulier ne se signale que dans le rapport direct à soi-même, étrrange  et étranger si l'on veut, si l'on juge du dehors, mais parfaitement identique à soi dans l'univers interne : "je" suis "je". Et encore, ce redoublement du "je" est-il suspect, puisque par définition le singulier ne souffre aucun redoublement, aucune répétition, aucune proposition extensive qui chercherait à l'expliciter. Le dé-finir, c'est le tuer. C'est dans ce sens , je suppose, que l'on a pu dire que la rose n' a pas de pourquoi, ni de pour-quoi. Ni cause ni finalité. Et me^même c'est trop dire que d'évoquer une identité de soi à soi. Non, un seul mot : singularité.

Soit dit ern passant, c'est pour cette raison que le fameux principe d'identité me fait bien rire. Comment affirmer que A=A sans se surprendre à radoter comme un vieillard caccochyme! A, cela suffit. Ajouter ègale A c'est dédoubler le A entre celui qui est et celui que l'on pense, c'est s'épuiser à rechercher une impossible coincidence. Je dirais de même pour ceux qui affirment de dieu : "je suis celui qui suis" Une telle proposition éveille le soupçon au lieu de l'endormir! Décidément, l'identité n'est pas la singularité!

De la singularité je ne puis donner de définition, mais je peux tenter de la situer. Soit elle se confond avec une substance personnelle indéracinable à la manière de la chose pensante de Descartes ou de l'âme chrétienne. Soit j'affirme qu'il n' y a rien que des apparences et des rapports interdépendants : anatta de Bouddha, que l'on traduit par non-soi. Mais Bouddha ne dit pas que l'âme n'existe pas,  il dit qu'il n'existe pas d'âme substantielle, fixe, durable et immortelle, ce qui est bien différent. Généralement, dans une lecture hâtive, on tire Bouddha du côté du nihilisme. C'est une erreur. Bouddha suit la Voie du Milieu :  ni éternalisme de l'âme substantielle à quoi s'identifier, ni nihilisme, c'est à dire néant d'existence. Le singulier est bien existant, mais pas sur le mode d'un être substantiel. Il est un agrégat d'agrégats (théorie des cinq agrégats) donc une existence toute relative, fuyante, évanescente et impermanente, mais réelle tout de même, quoique sur un mode quasi impensable. De même pour un Epicurien, s'il y a un Moi, et il ne fait aucun doute qu'il y en ait autant que d'individus puisque les deux termes sont superposables, il ne peut être autre chose qu'un conglomérat d'atomes et de vide voués à la dissolution. Cela n'empêche pas chaque corps d'être une combinaison unique, originale, "idiote", sans double ni réplique. Si nous sommes irremplaçables ce n'est pas au titre d'un mérite particulier mais de ce que chacun et chaque chose est unique à être soi.

Si la morale estle discours normatif de la collectivité et des religions pour ranger les particuliers à l'ordre commun, l'éthique sera la pensée et la pratique du singulier. C'est cela que l'on oublie, c'est cela qu'on refoule. Et c'est cela seul qui fonde authentiquement l'existence.

Publicité
Publicité
Commentaires
Newsletter
155 abonnés
Publicité
Derniers commentaires
Publicité