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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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14 juillet 2007

Névrose et psychose

Avec Freud apparaît une césure nette entre les deux structures. La névrose serait révélatrice d'un conflit entre le conscient et l'inconscient (refoulement incomplet avec retour du refoulé) alors que la psychose serait l'expression d'un conflit entre le moi et la réalité, à laquelle le sujet substitue une néo-réalité délirante. En fait cela définit bien le délire, mais assez mal la psychose, si l'on admet que délire et psychose ne sont pas parfaitement superposables. La nouveauté révelée par les successeurs de Freud : on peut être psychotique sans délirer, le délire n'étant qu'une manifestation extrême de la décompensation psychotique qui ne ne se produit pas toujours, certains psychotiques apparaissant "normaux" jusqu'à la fin de leur vie, dans des circonstances favorables. Donc il faut distinguer psychose avérée ( crise, décompensation, délire, prostration, catatonie etc) et psychose latente - laquelle, encore une fois ne dégénère pas forcément en crise ou comportement délirant. Mais alors, quand parler de psychose?

Là dessus, il faut bien le dire, les auteurs divergent. A lire Mélanie Klein les composantes de la psychose se retrouvent dans la toute petite enfance, en raison de l'immaturité du moi, qui oblige le jeune sujet à recourir à des modalités de défense très archaïques (clivage, morcellemnt, projection, identification etc) qui devraient normalement céder la place à des formations plus matures, telles qu'on les trouve dans la névrose (refoulement, ambivalence, choix d'objet libidinal etc) voire dans la pleine santé psychique. Si on admet cette position qui est celle de presque tous les successeurs de Mélanie, on en vient à estimer qu'il y a une sorte de "psychose" originelle, celle de l'enfance, psychose par défaut, mais non pathologique, sauf si elle perdure. Cela nous induit à penser qu'il y aurait en tout individu un noyau psychotique plus ou moins invalidant, plus ou moins puissant, et la plupart du temps parfaitement négligeable. Mais pour certains sujets on peut parler d' une "potentialité psychotique" (Piera Aulagnier) c'est à dire d'une structure archaïque mal intégrée qui prédisposerait le sujet à des accidents de parcours plus ou moins graves. En ce sens dans les psychoses on retrouverait toujours une pathologie familiale plus ou moins ouverte, des chocs ou traumas infantiles, des carences affectives ou symboliques, la haine du couple dans la paranoia, l'absence de nom du père dans la schizophrénie, le moi non constitué dans la mélancolie etc. Lacan montrera que l'éclosion de la psychose est affaire de circonstances : apparition soudaine d'un tiers en position de père par exemple. La potentialité psychotique n'est pas un destin, mais un concours de circonstances qui font "système" plongeant le sujet dans la plus grande détresse (abandon, carence, terreur, maltraitance, ou négligence...   )

En règle générale il existe un fossé bien net entre la structure névrotique et la psychotique, chacun évoluant selon les lignes de force de sa structure, qui ne varie guère une fois installée. Mais au cours des périodes récentes on se trouve de plus en plus souvent en présence de structures flottantes, "prépsychotiques" selon certains auteurs, borderline pour d' autres, qui ne relèvent pas vraiment ces deux structures princeps. Organisation plus molle, plus indécise, avec des traits archaïques voisinant avec des élaborations secondaires typiquement névrotiques, personnalité "as if" , faux self (Winnicott), pathologie psychosomatique, le tout sans délire, ce qui en principe écarte la psychose. C'est Bergeret qui donne de ces organisations le tableau le plus exhaustif et le plus convaincant Lire son livre "La dépression" chez PUF. et, en toute modestie, mon livre "Philosophie du Borderline" que je publie ici dans la rubrique Editions

Pour en finir, je pense, selon ma propre expérience, qu'en général névrose et psychose ne se confondent pas. Henry Ey disait : "Ne devient pas fou qui veut". Mais l'observation clinique nous oblige à reconnaître l'existence d'une organisation bâtarde, intermédiaire, où le glissement vers une structure ou l'autre est possible, voire fréquent. Souvent une structure névrotique apparente ne fait que dissimuler une organisation borderline sous-jacente, qui peut se révéler dans une décompensation ayant tous les traits de la psychose. La question est alors : comment faire pour éviter au sujet la chute dans une structure psychotique définitive. Là est le risque et la grandeur de la psychothérapie. GK

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