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LE JARDIN PHILOSOPHE : blog philo-poiétique de Guy Karl
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16 mai 2007

Sur Epicure

Je considère Epicure comme le véritable premier "philothérapeute", c'est à dire le premier qui,explicitement, entend mettre la philosophie au service de la vie heureuse, au détriment (très relatif d'ailleurs) de la spéculation.Il faut connaître pour mieux vivre et non pour faire le fanfaron. La connaissance a, elle aussi, ses tricheurs, ses histrions et ses idolâtres, qu'Epicure vitupère sans relâche. La connaissance, ou la "culture" peut donner lieu à une sorte de fringale, de boulimie qui ne se distingue de la goinfrerie et de l'avarice que par le contenu, et non par la forme. Il y a chez Epicure une sorte d'aristocratisme de la connaissance: tout le monde peut se cultiver, mais seule compte une culture utile à la vie. les autres savoirs ne sont que façade, montre, exhibition, impudicité voire mascarade.Par exemple il faut savoir que l'univers est, à notre connaissance du moins, formé d'atomes et de vide. Que les corps sont des agrégats éphémères et périssables. Que tout dans le cosmos est mortel sauf le cosmos lui-même. Que l'homme est formé de matière, qu'il est un corps, et que ce corps peut être sain ou malade, condamné à terme, quoi qu'onfasse:" Nous sommes tous, face à la mort, une citadelle sans murailles"? dit -il admirablement. Dès lors le projet philosophique se dessine de lui-même: étudier la nature, puisque nous en sommes des éléments, connaître les grandes lois de l'univers (et non le détail qui ne sert à rien), réfléchir sur les conditions et les pratiques de la santé, lutter contre le malheur, ne pas cultiver la souffrance et le dolorisme, ni les passions tristes qui ruinent, se resserrer sur l'essentiel (la méditation, la conversation, les exercices mentaux et physiques) et éviter ce qui nous fait du mal( principe de convenance).

Son point de départ est un constat très simple: les hommes sont pour la plupart malheureux. Lucrèce, après lui, évoquera les grandes figures mythologiques de la détresse humaine: Tantale l'assoiffé qui ne boit jamais, Sisyphe qui roule son rocher, comme un mineur dans sa mine, ou un avaricieux dans son échoppe, le tonneau des Danaïdes qui ne se remplit jamais,comme la chienlit de nos insatisfactions, Prométhée dont le foie dévoré repousse interminablement: images terrifiantes de nos passions macabres, de notre avidité, de notre volonté de maîtrise, de notre entêtement, de l'infamie de nos passions. Et au fond de tout cela...   la crainte . CRainte de la mort, (ou crainte de mourir?) crainte d'un au-delà macabre, des dieux et des châtiments infernaux, culture sinistre de la culpabilité. Nietzsche a bien vu dans Epicure une sorte de médecin de la civilisation, un redresseur, un artiste de l'innocence retrouvée, de la volupté sereine et tranquille, "un dieu des jardins". A-t-on jamais dit mieux après lui? VBien sûr il irrite les dévôts, indispose les prêtres de tout culte imaginable. Bien sûr il pourfend le ressentiment, la haine et l'ambition. Bien sûr il méprise les guerriers, les trancheurs de gorge, les fanatiques de toute moulure et texture. A la gloire d'Achille il oppose l'efficace thérapie d'Héraklès( les fameux travaux d'Hercule) comme symbolique de la réformation de soi. Bien sûr il cultive la douceur. Ce n'est pas unmacho. Dans son Jardin il recieille les femmes battues, les exclues, les prostituées, pensez-donc, les prostituées! On imagine ce qu'en diront les chrétiens! Seul entre tous il ouvre son école aux femmes, aux garçons et aux filles!( une exception tiutefois dans le machisme athénien, avec lui, les Cyniques et Diogène le Chien tout le premier). Mais enfin on a compris: ce qu'il enseigne c'est un monde contre le monde comme il va. Aujourd'hui il serait contre le marché impérialiste, contre Busch, contre la guerre de tous contre tous, contre la sauvagerie de nos exploitants et contre la famine et contre toux ces exécrables calculateurs qui mettent à sac notre pauvre planète!  Pauvre Epicure! Qui donc lui rendra justice,en dehors de quelques grands thérapeutes comme lui? On a voulu faire de l'épicurisme une philosophie de "pourceaux", d'incultes, de barbares embourgeoisés. Mais où trouve -t-on quelqu'un qui eut de son vivant des milliers d'amis et de correspondants jusqu'aux confins ultimes du monde grec, et d'Orient? Non, ce n'est pas une pensée de bâtard ou de souffreteux. C'est, contre apparence, pour qui sait lire, une des philosphies lezs plus subtiles qui fut jamais.

Dans le même sillage, qu'on me pardonne, je ne vois guère que Bouddha, dont je parlerai un autre jour, et, bien sûr l'incommensurable Pyrrhon D'Elis.

Voilà chers amis, une petite diatribe bien sentie! mais que nul ne se sente tenu d'être épicurien, ou pyrrhonien. Il ne faut pas se décalquer. Mais de tels exemples de beauté, d'accomplissement éthique, nous aident à oublier les hideuses bassesses de ce monde! Pour le dire plus familièrement: un monde qui aproduit de tels hommes ne peut être irréductiblement détestable!

(Je me propose de faire de temps en temps un petit développement de ce genre, si toutefois vous y trouvez plaisir. Pour moi-même, je ne vais pas prêcher un converti. J'avoue avoir grand plaisir à faire revivre des figures comme celles-là. Puissiez-vous y "gouster" un comparable plaisir - comme un bon vin de Samos, ïle bénie qui vit naître Epicure! Guy

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